Au début de l’année 2012, TSF a commencé à soutenir les activités médicales en Syrie avec des moyens de communication d’urgence. Un an plus tard, au cours d’une mission au camp d’Alsalama à la frontière turquo-syrienne, l’équipe TSF a visité l’école du camp et a constaté le manque de moyens auquel étaient confrontés les professeurs. Ils faisaient tout leur possible pour maintenir un contexte éducatif auprès de ces enfants ayant fui la guerre, et vivant sous des tentes dans des conditions très difficiles.
Très sensible à la situation de ces enfants, TSF a voulu contribuer à leur éducation grâce à des ressources numériques : première étape d’un ensemble de projets d’éducation numérique pour les enfants syriens, plusieurs fois arrêté, redémarré, modifié, relocalisé – au gré de l’évolution de la guerre dans le district d’Azaz, puis à Gaziantep, de l’autre côté de la frontière, en Turquie. Aujourd’hui, 9 ans après le début de ces activités, TSF transfère la gestion des dernières activités en place à Gaziantep à son partenaire local.
2013-2015 : le mLearning, ressources numériques pour l’éducation traditionnelle
Les premiers centres mLearning de TSF ont été ouverts en 2013 : au camp d’Alsalama et dans une école de la ville d’Azaz en Syrie, et à Gaziantep en Turquie, au sein d’une école ouverte spécialement pour les enfants réfugiés. Dans ces centres, un animateur TSF se coordonne avec les professeurs et propose aux enfants des activités numériques permettant d’illustrer de manière ludique et interactive les sujets abordés lors des cours classiques. Une importance particulière est donnée à la créativité des enfants, qui peuvent s’exprimer par la réalisation de dessins ou de bandes dessinées par exemple, réalisées le plus souvent en petit groupe sur les tablettes.
Pour s’adapter aux conditions d’enseignement en Syrie, l’équipe technique de TSF développe le mLearning kit, une bibliothèque de ressources numériques libres autonome permettant d’accéder aux contenus en cas d’indisponibilité du réseau internet, ou de l’électricité. Cette bibliothèque comprenait notamment les cours Khan Academy.
Ces activités ont touché plus d’un millier d’enfants entre 2013 et 2015.
2016-2017 : intégration au cursus scolaire
Au début de l’année 2016, l’école partenaire de TSF à Gaziantep est transformée par les autorités turques, qui souhaitent harmoniser l’enseignement et intégrer les réfugiés syriens dans le système éducatif turc, sans intervention d’ONG internationales. De ce fait, les activités cessent temporairement en Turquie, mais continuent en Syrie, au camp d’Alsalama et dans la ville d’Azaz.
En fin d’année 2016, un financement dédié permet à TSF d’élargir les activités à 2 écoles supplémentaires à Azaz, en partenariat avec le bureau local en charge de l’éducation (Azaz Local Council’s Educational Office). La conception de ce projet prévoit que les animateurs TSF interviennent pendant les cours, en étroite collaboration avec les professeurs. L’objectif final sur 2 ans est de faire découvrir les ressources numériques aux professeurs et de les former à leur utilisation en situation, afin qu’ils continuent à utiliser ces ressources une fois le projet terminé.
Si une certaine réticence existe parmi les professeurs en début de projet, une évaluation à la fin de la première année (Juin 2017) montre qu’une très large majorité des professeurs (89%) apprécie l’utilisation du numérique pendant la classe et la rend plus interactive. Si plus de la moitié d’entre eux se sent en partie déstabilisé par l’introduction des contenus numériques, la même proportion a également constaté que ces ressources remotivent les élèves en permettant d’aborder un sujet vu en classe d’une autre manière.
Malgré ce succès, le partenariat ne peut être reconduit pour la 2e année du projet car le secteur de l’éducation dans le district d’Azaz doit suivre les mêmes règles que sur le territoire turc. L’enseignement se recentre sur le cursus traditionnel et ne permet plus aux ONG internationales d’intervenir.
2018-2019 : aboutissement de la pédagogie avec les ceintures de compétences
Depuis le début du projet, deux questions sont au centre des activités mLearning :
1/ comment mesurer les savoirs acquis par les enfants lors des activités numériques
2/ comment adapter les activités à la situation des enfants : traumatismes psychologiques, disparités de cursus scolaires, décrochages etc.
Pendant toutes ces années d’activités, ces deux questions sont souvent revenues et ont fait l’objet de nombreuses réflexions au sein de l’équipe TSF en Syrie comme au siège. L’intégration au projet d’un volontaire expert en pédagogie a permis de formaliser le cursus d’apprentissage sous forme de ceintures de compétences. Nous l’avons dit : la créativité et l’interactivité sont au centre du programme mLearning depuis son lancement. Les ceintures de compétences ont permis aux animateurs TSF de transformer légèrement le déroulement des séances, la disposition des lieux d’activités, et leur posture d’éducateur, de manière à rendre les enfants plus conscients de leurs progrès, et donc d’assurer que les activités renforcent la confiance en soi des enfants.
Enfin, la progression personnalisée qui fait partie intégrante des ceintures a permis un meilleur suivi d’enfants en situation instable, ou qui ont repris l’activité après quelques mois d’absence à cause de leur situation familiale.
A la fin de l’année 2018, les activités en Syrie n’ont plus été possibles, fautes de partenaires sur l’activité. Le programme mLearning a donc continué auprès des enfants syriens réfugiés à Gaziantep, en partenariat avec l’association Minber Alsham.
2020-2022 : COVID-19 et lab4future
Après avoir formé les professeurs partenaires au sein de Minber Alsham, les animateurs TSF se sont concentré sur les savoir-faire numériques à partir de l’année 2020, avec le projet lab4future.
Le lab4future conserve les éléments pédagogiques et le côté ludique et interactif des activités mLearning en se concentrant sur l’initiation au numérique : utilisation des outils informatique et sensibilisation à leurs différents usages, et initiation à la programmation grâce à Scratch et au robot pédagogique mBot. L’arrivée du COVID-19 a perturbé le lancement du projet, mais les séances ont facilement basculé en distanciel et ont repris en présence dès que la situation sanitaire l’a permis. Aujourd’hui les activités sont assurés par les mêmes animateurs formés par TSF et géré par l’organisation locale Minber Alsham, qui a été partenaire de TSF sur l’implémentation de ce projet depuis 2018.
Ces 9 ans d’activités ont permis à des milliers d’enfants de reprendre leur éducation, de retrouver l’envie d’apprendre, d’améliorer la confiance en soi et de trouver un endroit sûr ou pouvoir rêver à nouveau. Aujourd’hui, TSF continue à travailler afin d’améliorer le projet Lab4Future et de pouvoir l’implémenter sur d’autres crises humanitaires pour permettre à d’autres jeunes et enfants victimes de ces crises de retrouver l’espoir et leur statut d’enfant.